Ce samedi se tiendra sur le court Suzanne Lenglen, un troisième tour de Roland Garros particulièrement alléchant entre deux prodiges du tennis féminin. D’un côté du filet, Coco Gauff 19 ans et déjà installée dans le Top 100 depuis quatre ans et de l’autre Mirra Andreeva 16 ans, qui fera son entrée dans les 100 meilleures mondiales à l’issue du tournoi.
Des temps de passage relativement similaire
“Je ne m’attendais pas à ce qu’elle joue aussi juste, je me suis fait un peu marcher dessus”. Mirra Andreeva a impressionné tout son monde, à commencer par son adversaire Diane Parry, auteur de cette déclaration ce jeudi après sa défaite au deuxième tour de Roland-Garros : 6/2 6/1 devant les tribunes combles du court Simonne-Matthieu. Une qualification pour le troisième tour à 16 ans et un mois. Il ne faut pas remonter très loin dans les archives du tennis féminin pour retrouver trace d’une telle précocité. La dernière à avoir atteint ce stade d’un tournoi du Grand Chelem si jeune, c’est Coco Gauff en 2019 à Wimbledon.
Du haut de ses 15 ans et issue des qualifications, comme Andreeva à Paris cette année, l’Américaine avait rallié les huitièmes de finale avant de s’incliner contre Simona Halep. Elle était devenue, sur le gazon britannique, la plus jeune joueuse à remporter un match en Majeur depuis Anna Kournikova à l’US Open 1996. Ce qui frappe chez ces jeunes filles respectivement nées en 2004 pour Gauff et 2007 pour Andreeva, c’est ce sentiment de maturité anormale à cet âge là. Pour preuve, dans son Wimbledon 2019 qui l’a révélé au plus haut niveau, Gauff passe son troisième tour contre Polona Hercog en sauvant deux balles de matchs.
Andreeva, elle, n’a pas été si proche de la sortie dans son deuxième tour de Roland-Garros, mais sa résistance et son calme face au public parisien en dit long sur son caractère en béton armé. Elle est d’ailleurs devenue avec sa victoire sur Diane Parry, la première joueuse à remporter ses deux premiers matchs en Grand Chelem en ne concédant que trois jeux ou moins par match depuis Mirjana Lučić à l’US Open 1997. Mais pas de quoi sauter au plafond pour elle qui place le curseur de sa carrière bien plus haut qu’un troisième tour de Majeur :
“Pour le moment, je ne compte pas beaucoup de victoires, je n’ai pas encore remporté de tournoi. Je joue, c’est tout. C’est simplement le troisième tour de Roland-Garros mais je n’ai pas encore soulevé de trophée ou réalisé un exploit incroyable” – Mirra Andreeva en conf de presse, des propos rapportés par L’Équipe.
La comparaison entre ces deux joueuses ne s’arrête pas là. S’il n’y a plus de Françaises dans le tableau final à Roland-Garros, il y aura bien trois Français dans les boxs du choc des benjamines. D’un côté Patrick Mouratoglou, au chevet de Coco Gauff depuis 2015 et de l’autre Jean-René Lisnard et Jean-Christophe Faurel qui ont pris sous leurs ailes la petite Andreeva alors qu’elle n’avait que 14 ans.
Pour Gauff, l’expérience mais aussi la pression
Alors au moment d’imaginer le scénario de cette rencontre qui promet d’être envoûtante, nous devons constater que Coco Gauff apparaît presque comme une grand-mère face à son adversaire malgré qu’elle n’ait atteint la majorité française qu’il y a seulement trois mois. Face au CV totalement vierge d’Andreeva en tournoi du Grand Chelem, l’Américaine a des arguments à faire valoir. D’abord parce que ce Roland-Garros 2023 est déjà sa 13e participation à un Majeur et parce qu’elle a passé à sept reprises le stade du troisième tour. Une expérience qu’elle a reconnu en conférence de presse dans l’Équipe après sa victoire du deuxième tour ce jeudi :
« Il faut jouer comme si c’était n’importe quelle autre personne. Elle a prouvé qu’elle avait sa place ici, alors je vais juste faire de mon mieux. Quand j’avais son âge, je ne pensais pas réellement à ça. Et je suis sûre qu’elle n’y pense pas non plus. Une fois un pied sur le court, ce n’est pas quelque chose auquel on pense »
Malgré cela, sa finale atteint l’an passé Porte d’Auteuil, qui pourrait tout à fait apparaître comme un argument en faveur de Gauff, risque, en raison de sa dynamique actuelle, la desservir. L’Américaine est en effet arrivée cette année à Paris, sans grande référence sur terre battue. Trois défaites contre des adversaires à sa portée : Potapova (Stuttgart), Badosa (Madrid) et Bouzkova (Rome). Les repères sont donc fragiles au moment de boucler la première semaine du Grand Chelem parisien. À l’inverse la pression de perdre ses points de la finale de 2022 pourrait être pesante. Même si après sa victoire convaincante contre Grabher au deuxième tour ce jeudi, l’Américaine s’est voulue rassurante sur son niveau de jeu :
« Je me sens vraiment bien. Je devais jouer mon jeu car c’est une adversaire difficile à affronter. Je pense que je bouge bien sur le court et que j’arrive à m’adapter aux conditions de cette année.«
En face, Andreeva abordera cette rencontre sans complexe, dans la peau de l’outsider. Un statut qui lui a déjà bien réussi à Madrid où elle avait éjecté du tournoi trois joueuses du top 50.
Roland Garros va donc nous offrir ce samedi un duel entre deux prodiges du tennis féminin. Un match à ne rater sous aucun prétexte, qui pourrait bien être la première page du livre de cette rivalité russo-américaine qui promet d’être historique.
