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Boris Vallejo, coach de Gabriel Debru : “La progression, surtout à son âge, n’est jamais linéaire”

Gabriel Debru
Source image : ATP Challenger Tour (screenshot)

Depuis son titre chez les juniors à Roland-Garros en 2022, Jeu Blanc suit de près la progression de Gabriel Debru (17 ans). En fin de saison dernière le jeune Grenoblois nous avait confié son ambition de se lancer dans le monde professionnel. Un peu plus d’un an après, le voilà déjà 316e mondial, avec une finale en Challenger atteinte la semaine passée à Prague. Une progression fulgurante sur laquelle revient son entraîneur Boris Vallejo. 

Interview réalisée en marge du tournoi Challenger de Lyon (du 12 au 18 juin) , avant la finale de Gabriel Debru en République Tchèque ce dimanche. Dans le Rhône, Debru avait fait honneur à l’invitation que lui avait accordé l’organisation du tournoi, en ralliant sa première demi-finale en Challenger, grâce notamment à des victoires de prestige sur Pedro Martinez et Benoît Paire. 

La progression de Gabriel Debru

Avant cette belle semaine à Lyon, il y a eu des petits couacs et des défaites inattendues. Comment jugez-vous votre progression depuis ce sacre à Roland-Garros l’an dernier ? 

Quand tu te fixes des objectifs, tu vas toujours chercher le maximum. Mais il faut aussi être conscient que la progression, surtout à cet âge là, n’est jamais linéaire. Il y a forcément des moments de stagnations comme des moments où ça va avancer un peu plus vite que ce que tu espérais. Il y a eu pour Gabriel, une période de transition entre les juniors et les seniors qui a été un peu brutale. Parce que quand tu as l’habitude de gagner beaucoup de matchs en junior, tu t’attends, au fond de toi, à ce que ça continue comme ça chez les grands. Puis t’arrives sur des Futures et tu te rends compte qu’il y a des gars qui ont plus de maturité, qui s’accrochent comme des dingues et tu réalises que la route va être longue. C’est quelque chose qui te percute. 

Comment gérer vous cela ? 

Chacun a son rythme de maturité. Gabriel est en fin d’adolescence et c’est un moment de la vie ou il se passe beaucoup de choses. Il faut être patient, tout en maintenant une vraie exigence. C’est ça qui est difficile pour des jeunes joueurs. Nous les coachs on est obligé d’être très exigeant parce qu’on sait qu’il n’y pas d’autres alternatives pour devenir bon. Mais cette discipline ne doit pas effacer la créativité. Gabriel est un joueur et cette capacité à varier doit se mettre au service d’une base de jeu. C’est un âge ou tu dois comprendre que le tennis c’est ton métier, que tu dois bien le faire même quand c’est difficile, même quand tu es fatigué. Sans ces bases fondamentales, tu seras peut-être capable de coups d’éclats une fois de temps en temps mais tu ne construis pas une carrière. 

Sur quel aspect de son jeu a-t-il le plus progressé depuis un an ? 

Ce qui m’a vraiment plu cette semaine à Lyon c’est sa concentration. Il a été capable sur l’ensemble de la semaine à maintenir un niveau de concentration très élevé et c’est quelque chose qui a une incidence sur le reste de son jeu. C’est là encore toute la différence avec le circuit junior ou il pouvait se permettre de passer à côté de deux jeux sans que ça ait trop de conséquences. Là, ce genre de tournoi réclame une exigence supérieure. 

Comment avez-vous vécu l’ascension de ses potes Arthur Fils et Luca Van Assche ? 

Ce sont de très bons copains de Gabriel, il les adore et est extrêmement content pour eux. Chez nos jeunes joueurs en France, il y a une émulation qui est très saine. Mais il se compare très peu aux autres mais très certainement que ça le conforte dans le fait que c’est possible. Chacun a son rythme et l’important est d’aller le plus loin possible. Mais c’est évident que Luca et Arthur sont deux supers exemples. 

Leur relation entraîneur/joueur : “Mon rôle est aussi de l’ouvrir à d’autres choses que le tennis”

Quelle est la nature de votre relation ? 

Je connais Gabriel depuis qu’il est très jeune parce que notre première rencontre c’était au tournoi des Petits As, il devait avoir 13 ans. Ce qui est déterminant dans notre relation c’est qu’il y a une confiance réciproque. La relation coach-joueur est fondamentale mais il y a autre chose. En tant que coach j’estime avoir ce rôle d’éducateur et ce qui se passe hors court est également très important. Ma priorité c’est de garder ma place d’entraîneur. Mon but numéro un c’est qu’il progresse et c’est de l’aider à atteindre les objectifs qu’il a en tête. Après bien évidement il faut apprécier les moments sur le circuit et pour ça le fait de bien s’entendre c’est super chouette. 

Quand vous coachez un jeune joueur comme Gabriel Debru, votre champ d’intervention peut s’étendre au-delà du court ? 

Forcément, mon rôle est aussi de l’ouvrir à d’autres choses que le tennis. C’est primordial dans son développement personnel et donc dans sa capacité à être performant sur le terrain. Tout ce qui se passe en dehors du court est évidemment non négligeable à mon sens. 

Par quoi matérialisez- vous cela ?

C’est très divers mais ça passe beaucoup par la culture. Même si c’est par petite touche parce que cette année il avait encore l’école qui lui prenait beaucoup de temps. Mais quand tu peux, c’est très important de l’ouvrir et de faire en sorte qu’il s’intéresse aux lieux qu’il visite.

Quand on est joueur de tennis, il faut aimer voyager et je pense qu’on peut s’enrichir de par les lieux qu’on visite. Ce sont des moments qui peuvent te créer de l’émotion et te faire réfléchir. Par exemple, l’an passé nous étions à Rome pour la Coupe Galéa et avec les gars (Gabriel Debru, Arthur Fils, Luca Van Assche) on a fait un tour de la ville en trottinette. On est allé voir le Colisée, le Panthéon et ils étaient super contents et chacun, avec sa sensibilité, va en retirer quelque chose. Ce sont des petites expériences qui ponctuent ton année et qui te permettent d’avoir des repères. 

Qu’est ce qui vous impressionne le plus chez Gabriel ? 

C’est quelqu’un de très spontané et très positif. Il respire la joie de vivre et ça c’est génial et c’est surtout une qualité qui pourra lui servir au cours de sa carrière pour surmonter les moments difficiles. C’est quelqu’un avec qui tu peux discuter, il n’est pas rancunier, il est à l’écoute. Il a cette capacité à encaisser les choses et à très vite rebondir. 

Il s’aligne régulièrement en double sur les tournois. Qu’est-ce que ça lui apporte ? 

Déjà il adore ça. Cette année ça a été un peu compliqué parce qu’il voulait jouer des doubles et je lui ai dis non parce qu’il devait garder du temps pour ses révisions. Maintenant que les épreuves du bac sont derrière lui, le double va revenir petit à petit. Il faut juste placer cela intelligemment, choisir les bons partenaires. Mais pour lui le double c’est presque comme une récupération active, il ne dépense pas beaucoup d’énergie, il ne ressent pas beaucoup de stress donc c’est une approche de match différente et ça le sert dans sa progression. Et puis mine de rien c’est un exercice qui fait partie des grands évènements tennistiques. Ce qu’on peut lui souhaiter c’est de représenter la France dans de grands évènements comme des Jeux Olympiques ou la Coupe Davis. 

Jusqu’où voyez-vous aller Gabriel ? 

Quand tu es entraîneur d’un jeune joueur comme lui, tu ne te fixes pas de limites. 

Mathis Healy

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