La saison 2023 est maintenant derrière nous. Elle nous aura rempli de joie, d’adrénaline, d’excitation même, mais également de profonde tristesse voire de désintérêt pour certains avec un niveau du Top 10 pas toujours au top. Des matchs renversants complètement fous de la part d’un nouveau Big 4, des records battus à la pelle (surtout par un joueur), mais aussi de nombreux absents majeurs. Une ère est en train de se tourner. Pour se remettre tout ça en tête, Jeu Blanc vous propose une série de 50 articles en guise de memento.
Parfois au tennis il y a des périodes où toutes nos frappes passent. Qu’elles soient puissantes, courtes, à plat ou avec de l’effet, tout rentre. Un sentiment inexplicable, mais qui comble n’importe quel joueur de bonheur. Cette période, Christopher Eubanks l’a connu durant deux semaines l’été dernier sur gazon.
Christopher Eubanks : un été magique sur gazon
Grand pote de Ben Shelton, Christopher Eubanks a connu une trajectoire à l’image de son buddy. En montagne russe pour faire simple. Mais quand il a atteint le sommet de ce grand huit, les dégâts ont été colossaux. Déjà pour bien se mettre dans le bain de Wimbledon, l’Américain remporte le 250 de Majorque contre Adrian Mannarino. Puis, en arrivant pour son premier majeur londonien, il casse l’ambiance d’entrée en battant le meilleur espoir local, Cameron Norrie au deuxième tour 6/3 3/6 6/2 7/6. Durant la première semaine, Seyboth Wild et O’Connell se sont aussi cassé les dents sur la grande tige.
Qualifié pour sa première deuxième semaine de Grand Chelem, il marque le public par sa folie. Il tente des coups improbables, parfois même en fermant les yeux, mais ça passe. Eubanks est dans la zone ! Confronté à Stefanos Tsitsipas, il sait qu’il y a une belle perf à aller chercher car même si Stef prend en confiance comme contre Dominic Thiem, la gazon est de loin sa pire surface. Mais le Grec, reste un Top 5 et il fait sa loi dans le premier set. Eubanks, peut-être stressé par l’événement, fait 14 fautes directes et subit un service redoutable en face. 6/3 sans contestation possible.
Petit à petit, Chris revient, le ratio coup gagnant/faute direct se redresse et il égalise au tie-break. Le public chavire complètement dans la Eubanks Mania. Mais comme à son habitude, Tsitsipas est dans sa bulle. Ce que scande le public ne l’affecte pas. Son service est rodé comme jamais. Plus de 90% de première balle, 100% de seconde balle et 100% de points gagnés après sa seconde balle. 6/3 Tsitsipas qui est en mode robot conquérant.
Christopher Eubanks : un quart qui bascule dans la folie
En fin de match, l’Américain lâche les chevaux. Il est plus agressif, joue plus long, embête Stef sur son revers comme tout le circuit et surtout sert mieux sur les points clés. Une nouvelle fois, il égalise à deux sets partout et la rencontre part dans une folie de cinquième set. Quand on vous disait qu’Eubanks était dans la zone, ce cinquième set contre Tsitsipas en est la preuve. Il se transforme en Federer Picasso, c’est à dire qu’à première vue c’est moche, c’est disgracieux, mais qu’au final, le résultat est splendide. Ses revers à une main avec sa technique bancale long de ligne qui passe à foison sont l’incarnation de cela.
En plus, Christopher transforme ce huitième de finale dans le temple bien lisse, bien bourgeois de Wimbledon en show à l’Américaine. Et le public suit. Résultat : victoire sur un coup droit alcarazien pour s’offrir son premier Top 5 en carrière 3/6 7/6 3/6 6/4 6/4.
En quarts de finale, il retrouve Daniil Medvedev, autre membre de la Next Gen qui n’est pas censé jouer si bien que ça sur gazon. Vu la forme et la confiance accumulée par Eubanks, on se dit qu’il y a un coup à jouer. Et avec raison car la grande tige américaine mène deux sets à un avec la même recette que depuis deux semaines. Il colle même un 6/1 au 3e mondial dans le deuxième set. Il ramène le tennis des années 80 sur la place publique et gagne avec.
Le quatrième set se termine au tie-break. Eubanks pourra se dire qu’il a été à quatre points du match, mais pas sûr que ça le réconforte. Car au final, Medvedev égalise et file vers la victoire dans le cinquième set avec un lourd 6/1 d’ancien champion de Grand Chelem. Au total, Eubanks aura frappé 74 coups gagnants pour 55 fautes directes et claqué 17 aces. Des énormes chiffres, mais qui s’inclinent face aux 52 coups gagnants et seulement 13 fautes directes de Daniil. Le ratio est trop élevé d’un côté, sans oublier les 28 aces du Russe.
Cet enchaînement Majorque – Wimbledon, Eubanks n’est pas prêt de l’oublier. Il montera à la 29e place mondiale après cela, mais disparaitra complètement des radars après le majeur britannique. Ce jeu fantasque comporte également son lot de désavantage quand ça ne rentre pas. Il reste quand même un joueur à surveiller pour la saison 2024 surtout s’il vient à gagner en régularité.