La saison 2022 est maintenant derrière nous. Elle nous aura rempli de joie, d’adrénaline, d’excitation même, mais également de profonde tristesse. Des matchs renversants complètement fous, des Grand Chelem gagnés sur une patte, des records battus à la pelle, mais aussi de nombreux départs. Une ère est en train de se tourner. Pour se remettre tout ça en tête, Jeu Blanc vous propose une série de 50 articles en guise de memento.
On se plaint souvent de l’aseptisation du tennis. Conférences de presse lisses, questions vues et revues, une majorité de match sans débordement. Eh bien, Kyrgios et Tsitsipas ont tout fait voler en éclat lors du dernier Wimbledon. Les deux hommes ne s’aiment pas et leur animosité s’est ressentie sur le Court 1. L’impression de revivre les plus belles heures des duels McEnroe – Connors.
Un Mind Game d’exception
Quand on affronte Kyrgios, il faut un tennis au poil certes, mais avant tout être prêt dans la tête. L’Australien est un spécialiste pour retourner le cerveau de ses adversaires. Et à en croire la physionomie du match, Stefanos n’était pas prêt. Son adversaire lui a tout fait. Services à la cuillère, feintes de ce type de service, frappes hallucinantes de relâchement et d’une difficulté extrême. Le spectacle commence à 3-3 dans le premier set. Les services cuillère courts, rasant le filet font leur apparition. Du Nick dans le texte. Mais nous ne sommes pas encore entrés dans l’atmosphère chaotique qui nous attend. Nous assistons pour le moment simplement à un excellent match de tennis dans le plus grand tournoi du circuit.
Ça commence à chauffer lorsque Kyrgios égalise à un set partout. Pris d’énervement, Tsitsipas envoie fort une balle dans le premier rang. L’arbitre ne réagit pas. Kyrgios qui s’y connait bien en amende et en sanction demande à l’homme sur la chaise haute pourquoi il ne dit rien au Grec. Celui-ci répond qu’il n’a blessé personne. Kyrgios devient fou et c’est parti pour que le match s’envenime.
De retour dans les 80’s
On sent dans l’air cette électricité caractéristique des grands matchs. Une sensation perdue dans les années 70 mais surtout 80 où les McEnroe, Connors, Nastase laissaient leur émotions prendre le dessus et n’hésitaient pas à dire ce qu’ils pensaient que ce soit à l’arbitre ou à leur adversaire. Tout part de ce nouveau service cuillère de Kyrgios dans le 3e set que Tsitsipas expédie de rage en tribunes sans volonté de jouer. Cela fait rire l’Australien qui voit son plan fonctionner.
Quelques points plus tard, le Grec est à la volée, arme son smash, concentre toute sa force dans son biceps et envoie sa frappe vers Kyrgios avec l’intention de faire mal. Ça marche. Rebelote à 5-3 cette fois en attaque de coup droit. Littéralement trois points plus tard, Kyrgios dépose une amortie gagnante sur la let. Parfait pour encore faire monter l’adrénaline. Le n°2 australien célèbre avec un beau salut de théâtre et évidemment ne s’excuse pas, cela serait trop British pour le moment. Kyrgios finit par empocher la troisième manche et mène 2 sets à 1.
Mais au début du 4e set, le 45e mondial de l’époque glisse sur une motte de terre, chute, et se fait mal aux adducteurs. Tout le public retient son souffle car personne ne veut une telle fin. Bien sûr, Tsitsipas tourne le regard et va se replacer comme si de rien n’était. Mais il en fallait plus pour arrêter le show man. Il se relève et passe en mode Top Spin. Là on oublie les effets, les beaux gestes élégants techniques, on laisse place aux bourrins, au show et aux coups les plus proches des lignes possibles. Service qui touche la ligne d’un millimètre, coup droit en contre qui finit en un passing splendide, des mines envoyées dans tous les sens.
On assiste à du tennis champagne, cru 2022, qui restera dans les mémoires. Le match se termine sur un tie-break. Le Grec sauve une balle de match, l’Australien une balle de set. C’est ce dernier qui aura la deuxième occas en premier. À l’ancienne, Kyrgios réalise un service volée gagnant et remporte cette guerre des nerfs 6/7 6/4 6/3 7/6.
Nick Kyrgios aura encore marqué le tennis de son empreinte après un tel match dans une ambiance unique. Stefanos Tsitsipas continue de s’enfoncer et est encore victime d’un joueur fantasque. L’Australien ira jusqu’en finale face à un certain Novak Djokovic.