La saison 2022 est maintenant derrière nous. Elle nous aura rempli de joie, d’adrénaline, d’excitation même, mais également de profonde tristesse. Des matchs renversants complètement fous, des Grand Chelem gagnés sur une patte, des records battus à la pelle, mais aussi de nombreux départs. Une ère est en train de se tourner. Pour se remettre tout ça en tête, Jeu Blanc vous propose une série de 50 articles en guise de memento.
En annonçant le 7 mai dernier qu’il prendrait sa retraite en fin de saison, Gilles Simon s’attendait-il à de tels adieux ? Tombé à la 160e place mondiale, le Français de 37 ans n’arrivait plus à tenir le rythme du circuit. Relégué sur les tournois Challenger, il remportait un match par-ci par-là, parfois deux de suite, youpi (!), mais jamais davantage. En communiquant sa retraite future avant Roland-Garros, Simon espérait se voir offrir une dernière tournée d’adieux. Elle sera composée de deux dates. La première dans l’Ouest parisien et la deuxième dans l’Est de la Capitale.
Roland-Garros et l’effervescence du Simone-Matthieu
À Roland-Garros, Gilou bénéficie d’une Wild-Card pour saluer une dernière fois son public et dire au revoir à cette terre battue qui ne l’a jamais vraiment réussi. Avant son match du premier tour, Simon passe en coup de vent sur le Chatrier faire une bise à son pote Jo qui vient de jouer le dernier match de sa carrière.
Programmé en fin de journée sur le petit court Simone-Mathieu, Gilou avait certainement rêvé meilleur cadre pour ses adieux. Adieu ? Qui vous a parlé d’adieux ? Bien qu’opposé à Pablo Carreno Busta, 18e joueur mondial, Simon n’est pas du genre à lâcher les armes trop facilement. Oubliez les récentes défaites face Evgeny Karlovskiy 278e à Saint-Brieuc, face à Gian Marco Moroni 178e à Rome ou face à Oleksii Krutykh 314e à Heilbronn. Ce soir-là, l’ancien 6e joueur mondial qu’il a été renaît de ses cendres sous les vivas d’une foule en délire. À 500m du Parc des Princes, l’ambiance du court des Serres ressemblait, ce soir-là, à la tribune Auteuil des supporters du PSG. Dans ce volcan, Carreno Busta perd pied et Simon repousse une première fois sa “der” 6/4 6/4 1/6 4/6 6/4.
Au tour suivant, l’Américain Steve Johnson subit la même loi d’un Simon à la jeunesse retrouvée. Sur le court Philippe Chatrier cette fois, le Niçois s’impose 7/5 6/1 7/6. En 16e de finale il se retrouve face à Marin Cilic, adversaire que Simon s’est amusé à battre à sept reprises en huit confrontations dans le passé. Le voilà qui, à 37 ans, est à une marche d’égaler son meilleur parcours à Roland-Garros. Mais ce match est celui de trop. Usé, Gilou ne rivalise pas face au géant Croate et s’arrête là. Une défaite 6/0 6/3 6/2, mais une invitation honorée et des premiers adieux plus que réussis.
La folie Bercy
De l’autre côté de la capitale, Simon retrouve le public parisien au Masters 1000 de Bercy. Comme attendu, Roland-Garros était une parenthèse enchantée dans la saison du Français, souvent défait dès les premiers tours des tournois. Le Rolex Paris Masters est donc le dernier de sa belle et longue carrière. Opposé dès le premier tour à Andy Murray, l’idée que Gilou refasse le coup de la Porte d’Auteuil trotte forcément dans toutes les têtes. Mais le Britannique est sa bête noire. Sir Andy l’a battu à 16 reprises en 18 affrontements. Alors dans les tribunes, on a pris ses dispositions. Tsonga, Gasquet, Monfils et d’autres proches du Niçois sont là. Prêts à descendre sur le court pour saluer leur pote en bout de piste. Mais Simon va leur mettre un faux plan. Mené 6/3 5-3, Gilou fait ce qu’il fait de mieux : retourner le cerveau de son adversaire et le match. Comme Carreno Busta à Roland-Garros, Murray perd les pédales, sous la pression d’un Parc Omnisports de Paris Bercy incandescent. Simon s’impose 3/6 7/5 6/3.
En 8es de finale, l’Américain Taylor Fritz, récent vainqueur à Tokyo et en lice pour le Masters attend Gilou. Une nouvelle fois Simon nous refait le même show. Contre à un cador du circuit, très performant sur cette surface, Gilou s’accroche, passe outre la douleur et se laisse porter par un public une nouvelle fois génial. Après 3h06 il l’emporte 7/5 5/7 6/4, un scénario qui ne nous surprend presque plus, tant renverser les favoris est devenu sa spécialité.
« Putain j’ai mal partout, et là encore plus que d’habitude. Mais je suis prêt à mourir sur le terrain. Et mes nains (en parlant de ses fils en tribunes) ont tellement d’énergie que je leur en ai pris un peu. Au début du troisième set, je me sentais seul, mais seul… Mais j’ai levé la tête et j’ai vu que je n’étais pas tout seul. » (Gilles Simon en interview sur le court)
Il aura fallu Felix Auger-Aliassime, un joueur invincible depuis 14 matchs, vainqueur de trois tournois consécutifs pour stopper la déferlante Simon et mettre enfin un point final à une carrière magistrale. Un dernier discours plein d’humour et d’émotions sur le central de Bercy et Simon s’en alla rejoindre Juan Martin, Jo, Roger et les autres, de l’autre côté de la barrière.